Histoire de la Nouvelle France – Chapitre 3

Chapitre 3 : Les Européens de 1540 à 1600

Les explorateurs français commerçaient avec les Amérindiens dès le début de la découverte. Mais ce sont aussi les pêcheurs français, avec les Anglais, qui se disputaient les territoires de pêche au large de Terre Neuve, et se dirigèrent vers les côtes de la Nouvelle-Écosse et du golfe du Saint Laurent. Par la suite,
lorsque les guerres entre l’Angleterre et l’Espagne provoquèrent le déclin des pêcheries espagnoles, un nouveau marché s’ouvrit aux Français en ce qui concerne la morue séchée. Or, comme on ne faisait sécher la morue que sur terre, cette activité s’accrut dans le golfe où les conditions étaient très favorables. Les contacts avec les Amérindiens se multiplièrent. En particulier, on rapporte la présence d’un navire français qui faisait le commerce des fourrures à l’île du Cap Breton en 1539 (Biggar 1901)
Par la suite, vers la fin du siècle, les Basques français vinrent chasser la baleine et le morse aux îles de la Madeleine. En 1597, les Anglais tentèrent de s’y installer, sans succès (Quinn 1977).
À partir de 1580, les Européens s’intéressa surtout à la fourrure de castor. Il faut dire qu’il y avait en effet une grande demande de chapeaux de feutre de castor chez les bourgeois d’Europe occidentale. Les meilleurs fourrures qui se prêtaient au travail du feutrage étaient celles piégées en hiver. La forte demande en peaux de castor profite aux Amérindiens. Il faut savoir que la viande de castor contient un très grand nombre de calories utiles à l’énergie dépensée par les Amérindiens pour le piégeage.

Ainsi, après 1540, un nombre considérable de navires envahissent le golfe et le fleuve Saint Laurent. Tadoussac devient le premier lieu de traite. Le troc des peaux devient tellement important que vers 1588, de riches commerçants sollicite un monopole. Pierre de Chauvin dépêche jusqu’à quatre navires dans le golfe. Pont-Gravé se rend jusqu’à Trois Rivières pour troquer ses marchandises rapportées de France contre des fourrures. Champlain affirme que des navigateurs viennent régulièrement en Canada. Il pense que d’autres venaient déjà bien avant 1550 pour commercer avec les Amérindiens. Tout au cours du XVI siècle les pêcheries française s’étendent le long des côtes de la Nouvelle Écosse jusqu’au Maine. Mais ce sont aussi les pirates français, revenant de Floride et des Caraïbes, qui sillonnent les côtes et s’enrichissent.

En 1580, l’équipage du navire commandé par l’anglais John Walker attaqua un village Amérindien Abénaqui situé sur la rivière Penobscot et emporta 300 peaux. En 1583, l’explorateur français, Étienne Bellenger, tenta de fonder un comptoir ainsi qu’une mission dans la baie de Fundy. Mais c’est une attaque Amérindienne qui fît avorter le projet. Cela ne l’empêcha pas de rapporter en France une riche cargaison de fourrures de martres, de loutres et de lynx et surtout des peaux de castors pour fabriquer plus de 600 chapeaux. Étienne Bellenger rapporta également du castoreum, une huile rougeâtre extraite des glandes du castor, qui était utilisée pour la fabrication de remèdes et des parfums. Aujourd’hui, cette huile de castor est toujours utilisée dans des produits pour le visage et rouge à lèvre.
Dès 1583, le commerce du castor a connu une forte croissance.
Deux explorateurs anglais du nom de Gosnold en 1602, et Martin Pring en 1603, firent construire de petits comptoirs au sud de la Nouvelle Angleterre, mais ne trouvant pas, le long de ces côtes, assez de fourrures pour légitimer l’établissement de comptoirs permanents, il était plus profitable de ramasser les fourrures chaque été à l’aide de ces petits comptoirs saisonniers.

Mais dès 1603, des groupes d’Amérindiens Malécites et Abénaquis de la région du Maine partaient chaque année jusqu’à Tadoussac pour y échanger certaines de leurs fourrures (Biggar 1922 – Quinn 1979). Ces contacts renouvelés entre les Amérindiens et les blancs ne pouvaient que bouleverser la vie des autochtones. La même année, au printemps 1603, Champlain débarque en Nouvelle France. Il vient en observateur mais sur volonté royale. Le roi Henri IV avait donné ordre à Pont-Gravé de le recevoir en son vaisseau et lui faire connaître ces lieux. Champlain vient donc comme géographe et cartographe en Canada.
Le 28 mai 1603, Champlain quitte Tadoussac en compagnie de Pont-Gravé et des deux Amérindiens que ce dernier a ramené de France. Ils traversent l’embouchure du Saguenay, descendent à la Pointe aux Alouettes non loin de là. Ils se rendent tous à la cabane d’un grand chef Algonquin qui porte le nom de : Anadabijou. Ce dernier, en plein festin, au milieu d’une centaine de guerriers, accueil les nouveaux arrivants. Un conseil Amérindien se réunit aussitôt. Champlain dévisage curieusement ces autochtones qu’il découvre. L’un des Amérindiens qui accompagne Champlain et qui revient de France, se lève et parle amplement du pays qu’il a visité. Il raconte l’entrevue qu’il a eu avec Henri IV roi de France. Il explique que le roi voulait du bien à tous les Algonquins et désirait peupler leur terre. Pendant ce temps le calumet circule. Champlain et Pont-Gravé aspirent à leur tour de grandes bouffées de fumée d’herbes.
C’est ainsi, qu’à peine arrivé sur le sol de la Nouvelle France, Champlain assiste à une discussion sur l’alliance des Français et des Algonquins contre les Iroquois. Il apprend aussi que le Henri IV connaît déjà le problème et a même posé ses termes. Il veut établir des colonies et assure surtout les Algonquins de son amitié. Il sait qu’une guerre sévit entre eux et les Iroquois. Tout cela le roi le savait des récits des coloniaux du nom de : Chauvin, de Chaste, Pont-Gravé.

Puis, Anadabijou se lève pour donner réponse au nom de son peuple. Il connaît l’importance du moment. Il marque des pauses entre chaque phrase. Et, il déclare aux siens, qu’ils devaient tous être extrêmement contents d’avoir sa Majesté comme grand ami. Que ce dernier ferait la guerre à leurs ennemis et qu’il n’y avait autre Nation au monde que les Français à qui il veut du bien. Anadabijou accepte l’assistance militaire du roi.

Pourquoi les Français font-ils cette importante concession ?
Parce que Henri IV se doutait déjà des intérêts importants en jeu : commerce de fourrures, fondation d’une colonie française en Canada. Ce pacte sera d’une grande importance pour Anadabijou qui sait que les Iroquois sont en plus grand nombre que les Montagnais, Etchemins et Algonquins. Le conseil se termine mais ni Champlain, ni Pont-Gravé ne se doutent que la politique qui vient de s’élaborer dominera le siècle tout entier qui s’ouvre. C’est ici que les guerres iroquoise viennent de se décider. Elles vont sévirent jusqu’à la Grande Paix de Montréal en 1701.

Entre 1607 et 1615, la Nation des Micmacs et les Abénaquis se disputent pour déterminer lequel va jouer un rôle au sein des tribus de la Nouvelle Écosse (Snow 1976b). Les nombreux contacts avec les Européens entraînèrent des épidémies et un déclin considérable de la population au XVI siècle. (Miller 1976-82)

Lisez la suite au chapitre 4 : Le fleuve, voie utile au transport des fourrures